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Sculptures aquaponiques


Le projet Sculptures Aquaponiques est un projet holistique et permaculturel où se mêlent l'art, le design, la technologie et l'écologie. Il est né de la rencontre entre des personnes évoluant dans des champs disciplinaires artistiques et scientifiques. Au départ une idée, celle d'allier l'aquaponie à l'art, c'est ainsi que germe un concept dans l'esprit de Nadia Russell Kissoon, auteure de L'Agence Créative et créatrice de la Galerie Tinbox : la création de Sculptures Aquaponiques. Pour concrétiser ce projet, elle s'est associée à deux artistes, Tommy Vissenberg, dessinateur et céramiste, et à Delphine Gouzille, designer. Le projet a ensuite été élaboré en partenariat avec deux scientifiques dans le cadre d'une résidence d'artistes à l'Université de Bordeaux UMR EPOC avec Jérôme Cachot, enseignant-chercheur HDR d'écotoxicologie aquatique, toxicologie environnementale et réglementaire et membre du comité d'éthique des animaux, et Magalie Baudrimont, directrice-adjointe UMR EPOC, professeure d'Ecotoxicologie aquatique, avec le soutien du festival FACTS. Leur collaboration a permis la création d'un projet pluridisciplinaire qui interroge différents champs de l'activité humaine et confronte les formes de pensées par un partage de connaissances.

Ce projet s'inscrit dans un programme élaboré par l'Agence Créative baptisé Il faut cultiver notre jardin. Il propose des résidences d'artistes, des productions d'œuvres et des expositions curatoriales d'artistes plasticiens qui s'emparent de l'écologie comme outil de réflexion, de création et d'action. Ce projet artistique engagé, sensible, esthétique et symbolique a pour objectif de questionner la relation de l'Homme à la nature sous le prisme de l'art contemporain. Il a une fonction sociale et politique et s'intéresse tout particulièrement aux artistes qui interrogent la nature comme bien commun.

La fonctionnalité est habituellement exclue des œuvres de Tommy Vissenberg. Il travaille la matière céramique dans la répétition sans idées préétablies concernant la forme qu'il laisse surgir. Quand celle-ci advient, il la confronte alors à la répétition et observe les changements qui se produisent d'un élément à l'autre. C'est un travail réalisé avec lenteur où l'aléatoire du résultat après cuisson est pris en compte comme faisant partie du processus créatif. Ses formes plastiques prennent possession de l'espace. Elles s'y déploient et s'installent selon des rythmes qui peuvent différer. Tommy Vissenberg laisse la matière s'exprimer, il ne cherche pas à conceptualiser son œuvre. Le temps et l'espace sont des notions importantes dans son travail qui incluent la recherche des formes, des couleurs et des gestes répétitifs. Inviter Tommy Vissenberg à travailler sur le projet Sculptures Aquaponiques, était lui offrir la possibilité de rompre avec son processus habituel de travail. Comment allier sa pratique artistique avec un dispositif ayant une fonctionnalité, celle de faire pousser des plantes dans un système symbiotique ?

Delphine Gouzille quant à elle est artiste-designer diplômée de l'école des Beaux-Arts de Bordeaux. Dans son travail de recherche personnel, elle questionne les relations qu'entretiennent les personnes vis-à-vis de leurs objets. Elle s'inspire de la notion " d'animaux de compagnie " propre à Andréa Branzi. Et c'est ainsi qu'elle tente de leur donner une forme de vie. Elle crée de petits laboratoires domestiques où le corps et les émotions ont une place importante dans la relation à l'objet. Ses productions intègrent également la notion de prendre soin, de temps et de sensibilité.

Le choix de Tommy Vissenberg a été de réaliser des sculptures à partir de moulages d'objets du quotidien (saladiers, becs verseurs de théières, moules à tarte, vases...) Ces éléments restent reconnaissables mais deviennent des sculptures hybrides par leur assemblage et leur couleur fondue dans la masse. La matière utilisée est la porcelaine, matière fragile et difficile à travailler, mais qui assure l'étanchéité des bacs de culture et ainsi le bon fonctionnement du système.

La forme totémique des œuvres a été travaillée conjointement par les deux artistes. Ce choix de la verticalité permet une activation en cascade du système. L'eau s'écoule d'un bac à un autre et laisse visible le mouvement du flux. L'ensemble prend un aspect fragile, les différents éléments semblent en effet tenir en équilibre les uns par rapport aux autres. Cette fragilité voulue est à l'image de la nature en général. Un élément polluant, une absence de nourriture, l'évaporation de l'eau entraîneraient en effet la mort des organismes vivants et des sculptures. Le projet se prolonge par la création de deux autres sculptures réalisées in situ dans la galerie Tinbox, sous la forme de deux bacs blancs reliés aux aquariums par des tuyauteries. Ces œuvres deviennent des extensions de l'espace de la galerie et forment un ensemble architectonique et organique venant rompre avec la verticalité des sculptures en porcelaine. Pour accueillir l'écosystème aquatique élaboré avec les scientifiques au sein de leur unité de recherche, les aquariums ont été réalisés à partir d'assemblages d'ustensiles de laboratoire. Ils ont été produits en partenariat avec un verrier scientifique. Leurs formes accentuent l'aspect de recherche, d'expérimentation et de laboratoire de l'œuvre que l'on retrouve également dans les tuyaux, pompes et câblages électriques qui sont intentionnellement visibles et jonchent le sol de la galerie.

Dans ce projet les œuvres sont des ensembles sculpturaux fonctionnant en symbiose où le processus de création reste visible. Le déséquilibre d'un élément entraînerait l'arrêt du système. Les " Sculptures Aquaponiques " sont ainsi des organismes vivants dont il est indispensable de prendre soin en permanence. Le temps est un facteur essentiel qui fait évoluer les œuvres : les plantes comestibles grandissent et meurent, les poissons ou les Lymnées se reproduisent et produisent des déchets, les sculptures sont transformées par l'écoulement de l'eau, la couleur change, les éléments se recouvrent d'algues. L'œuvre est ainsi en création et en transformation constante et se doit d'assurer le bien-être des espèces vivantes qui la composent.

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